Le mystère Henri Pick - David Foenkinos
En 1973, l'américan Richard Brautigan, proche de la Beat generation, publie "L'avortement", un roman dans lequel il imagine un bibliothécaire qui passe son temps dans une bibliothèque particulière regroupant tous les manuscrits refusés. Après le décès de Brautigan, une bibliothèque de ce type a effectivement été créée aux Etats-Unis.
C'est la lecture de ce livre qui a donné à David Foenkinos l'idée d'écrire Le mystère Henri Pick.
A Crozon, petite ville du Finistère, le bibliothécaire imite le personnage de Brautigan : dans les années 90, il met à la disposition des écrivains non publiés un rayonnage où les usagers peuvent venir puiser à leur gré. C'est ainsi que Delphine, une jeune éditrice de chez Grasset , dont la famille vit à Crozon, vient visiter cette bibliothèque avec son ami écrivain de talent mais encore inconnu. Tous deux y passent du temps et finissent par découvrir une histoire originale qui met en parallèle les dernières heures d'une histoire d'amour avec celles de Pouchkine. Son auteur se nomme Henri Pick. Après des recherches, il s'avère que cet homme, ancien pizzaiolo, est décédé depuis deux ans. Sa femme est éberluée par cette nouvelle, elle qui n'a jamais vu son mari lire ni écrire. Tout ce mystère autour du livre et de son auteur fait que Delphine sait que la publication de ce livre sera inévitablement un grand succès de librairie. Une question essentielle demeure : comment cet homme apparemment inculte a-t-il pu écrire un roman, qui en plus, suppose la lecture d'un grand écrivain russe? A-t-il été le pendant littéraire de la photographe Vivian Maïer qui, a toujours refusé la reconnaissance
David Foenkinos nous entraîne dans cette énigme avec son talent habituel, sa drôlerie, sa sensibilité. Sous des apparences de légèreté, l'auteur n'hésite pas à égratigner le milieu de l'édition,à souligner l'impact évident des médias dans la fabrication des succès littéraires, ainsi que dans leur capacité à bouleverser la vie des anonymes. On est pris dans cette histoire aux personnages multiples jusqu'au dénouement final, complètement inattendu, et si l'on peut reprocher quelques facilités de style, il n'en reste pas moins que ce que l'on aime chez cet auteur, c'est la variété des thèmes abordés dans ses romans, c'est sa plume qui mêle habilement comédie, polar, histoire d'amour. Sa plus grande qualité est certainement sa faculté à rester proche du lecteur, ce qu'il est aussi dans la vie : un être simple, délicat, à l'écoute de l'autre.
"La vie possède une dimension intérieure, avec des histoires qui n'ont pas d'incarnation dans la réalité mais qui pourtant sont vécues."