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Le blog de Ritournelle

Portrait de la jeune fille en feu

Ritournelle
Portrait de la jeune fille en feu

Le prix du scénario au dernier festival de Cannes fait une place de choix à la femme. Réalisé par Céline Sciamma, il met en lumière des personnages féminins d’une autre époque mais porteurs de revendications d’aujourd’hui.
En 1770, en Bretagne, une comtesse  demande à une femme peintre d’exécuter le portrait de sa seconde fille Héloïse pour l’envoyer à celui qu’elle veut lui faire épouser à Milan. La jeune fille , tout juste sortie du couvent à cause de la mort de son aînée, a déjà refusé un premier portrait pour signifier son hostilité à ce mariage. Alors sa mère imagine une stratégie pour arriver à ses fins : elle convoque Marianne, une femme peintre qui  servira de dame de compagnie à Héloïse et devra se contenter d’observer son modèle pour en faire un portrait .
Mais elle n'a pas prévu que cette machination va favoriser le rapprochement progressif des deux jeunes femmes et les mener jusqu'à la passion…
On ne peut s’empêcher de penser à Jane Campion et sa magnifique Leçon de piano, avec ce scénario qui capte si délicatement la naissance du désir, où tout se joue dans les gestes, les regards. L’absence de mots, les silences, l’attente, donnent toute son intensité à ce rapprochement subtil qui surprend Héloïse et surtout Marianne, dont c’est le premier amour.
Cette histoire incroyablement moderne est filmée dans un souci d’authenticité par rapport aux artistes féminines de l’époque :

"Je connaissais les vedettes qui attestaient de leur existence : Elisabeth Vigée Le Brun, Artemisia Gentileschi, Angelica Kauffmann. La difficulté à collecter des informations et des archives n’a pas réussi à faire longtemps écran à l’existence d’une véritable ébullition artistique féminine dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Les peintres étaient nombreuses et faisaient carrière à la faveur notamment de la mode du portrait."

Céline Sciamma offre un très bel hommage aux femmes peintres restées dans l’ombre, tente de réhabiliter le talent et la créativité de leurs œuvres, mais aussi de mettre en avant la frustration, la retenue imposées par les limites de l’émancipation féminine au 18ème siècle.
L’image, superbe, suit avec délicatesse le travail du portrait, la complicité physique et intellectuelle des deux protagonistes. Les scènes tournées en extérieur devant la mer sont sublimes, tout comme celles d'une  palette plus douce propre à traduire l'intimité des personnages en intérieur.
Les actrices Adèle Haenel et Noémie Marlent impressionnent par leur complicité, leur crédibilité, la grâce et la force de leur jeu .
Aucun rôle masculin dans ce film bouleversant tout en sensibilité , sensualité , élégance, que l’on regarde comme une toile de maître, sans oublier qu’il porte aussi de manière symbolique les revendications encore très actuelles de la condition féminine.

Portrait de la jeune fille en feu
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