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Le blog de Ritournelle

143, rue du désert

Ritournelle
143, rue du désert

"J’ai fait plusieurs fois la route en Algérie, notamment vers le Sud, pour trouver des lieux, des personnages, des histoires...Malika, était au bord de la case 'fantasme littéraire'. Dès que je suis entré chez elle, j’ai su que mon film était là, que c’était elle, cette dame de 74 ans qui avait décidé d’ouvrir une buvette au milieu du désert."

Ce second long métrage de Hassen Ferhani est un road-movie inversé : dans ce lieu perdu en plein désert, au bord de la nationale une qui relie Alger à Tamanrasset, Malika reçoit dans son café toutes sortes de clients : routiers, migrants, imam, touristes. Cette femme hors norme, sans mari, sans enfants, ayant fait le choix de quitter sa famille pour se retirer seule dans ce lieu au milieu de nulle part, est un peu une sainte pour certains : elle mérite respect car elle a une vie de chasteté et fait du bien aux gens; pour d'autres, elle est celle qui incite au péché en ramenant soi-disant de la ville de l'alcool et des femmes, celle qui n'a pas peur d'affronter les hommes qui n'acceptent pas sa différence.
Sa vie est inscrite dans ces échanges ; elle livre peu à peu ses secrets, les raisons de son isolement au coeur du désert, se montre à la fois forte et résignée au bon vouloir de Dieu.
Elle observe le monde à travers ses petites fenêtres ; en femme authentique et sincère, Malika sait que "les gens mentent , mais ils ne savent pas mentir". Ainsi, lorsqu'un client prétend partir à la recherche de son frère, elle perçoit le mensonge et invente à son tour le deuil de la fille qu'elle n'a pas eue.
Grâce à sa curiosité des êtres, on découvre la condition de ces transporteurs qui ont des salaires de misère, arrivent à peine à vivre avec la hausse du prix de l'essence, alors Malika s'insurge contre ces dirigeants qui ont détruit le beau visage de l'Algérie au nom de l'argent, contre la modernité qui voit s'installer en face de son café une station-service avec un café concurrent. Mais qu'importe, elle finira ses jours là, Malika , "la reine du désert"entourée de sa fidèle chatte Mimi et de ses deux chiens, elle proposera toujours thé, omelettes, eau et café aux voyageurs avec la même bienveillance et la même philosophie de vie.
Avec un rythme lent qui favorise la concentration sur les dialogues, sur la perception du paysage aride et du temps parfois long entre les passages des clients, le réalisateur s'attache à brosser le portrait d'une femme sincère et drôle, représentative du passé de l'Algérie, qui sait s'adapter à la personnalité de ses clients , partager leur difficultés ou s'amuser le temps d'un sketch, par exemple avec l'auteur Chawki Amari , pour nous offrir un délicieux moment d'humour.
Et lorsque le chant traditionnel amazigh vient rompre le silence du désert, l'émotion est au rendez-vous.
Entre documentaire et fiction, ce film, tout en sobriété, allie intensité, drôlerie , mystère et Histoire.
A voir sans hésitation

143, rue du désert
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