Dans les champs de bataille - L'insulte
Suite au film "Sous le ciel d'Alice" (voir article sur ce blog), j'ai eu envie de visionner ces deux autres films actuellement diffusés sur Arte qui font référence eux aussi à la guerre du Liban et à la situation actuelle de ce pays, le premier sorti en 2004, le second en 2017.
Dans les champs de bataille , de la réalisatrice Danielle Arbid , situe l'intrigue à Beyrouth pendant la guerre civile, en 1983.
Son intention était de montrer que la guerre n'exclut pas la vie :
"La guerre ne m'effraie pas. C'est dans ce sens-là que j'ai voulu faire ce film. Pour montrer comment on la vivait de l'intérieur. J'ai habité au Liban entre 1975 et 1990, je sais donc que l'être humain peut se familiariser avec la peur et le danger. Je l'ai expérimenté. On peut rire et aimer en temps de guerre. Tous les sentiments sont exacerbés, et la peur de mourir à chaque instant finit par procurer un sentiment de liberté inouï. On vit intensément."
C'est l'histoire de Lina, 12 ans, la benjamine d'une famille bourgeoise, seule préado dans un monde d'adultes où les tensions sont quotidiennes : sa mère ne supporte plus l'addiction au jeu de son mari qui est sans cesse endetté, la vieille tante revêche a la même addiction , mais elle sait encore ne pas dépasser les limites; elle règne sur la maisonnée, traite Siham, la bonne de 16 ans, quasiment comme une esclave.
Dans cette atmosphère pesante, Lina fuit les disputes pour tenir compagnie à Siham, tout en cautionnant ses amours clandestines. Elle est prise entre deux mondes, en toute innocence...
Ce film donne à voir de beaux portraits de femmes, celui de Lina qui découvre désir et peur, de sa mère révoltée, de sa tante autoritaire et de Siham qui rêve de liberté.
Il nous montre que la guerre exacerbe les passions, et que l'on tente de vivre malgré tout des moments précieux bien qu'éphémères .
A voir jusqu'au 31 août sur Arte.tv
A Beyrouth, la cohabitation des différentes communautés s'avère difficile, 30 ans après la fin de la guerre.
Ziad Doueiri nous le rappelle par l'intrigue de son film :
Yasser est palestinien, chef de chantier, Tony, chrétien sympathisant des Forces libanaises et garagiste. Lorsque Yasser entreprend de réparer la gouttière de l'appartement de Tony, celui-ci démolit son travail, ce qui lui vaut une insulte de la part de Yasser. L'histoire ne s'arrête pas là : Yasser refuse de s'excuser, puis dans un moment de colère suite à des paroles déplacées de Tony, il lui casse deux côtes.
Les deux hommes se retrouvent au tribunal.Yasser n'est pas condamné, mais Tony fait appel. Dans le second procès, ressortent des événements dramatiques de la guerre...
Ce film remarquablement mené fait ressortir que, au-delà des griefs que les deux hommes se reprochent, ce sont les souffrances passées qui ressurgissent , les violences de l'Histoire ancrées dans les mémoires, pour l'un, le massacre de Damour en 1970, pour l'autre, Septembre noir. L'émotion prend le pas sur la raison, mais le pardon n'est pas impossible...
Est à souligner la force des plaidoiries, remarquablement portées par un avocat, opposé à sa fille pour la partie adverse. Par ce détail, le réalisateur met l'accent sur la possibilité pour les femmes de conduire le pays sur le chemin de la paix , en bannissant la haine et en tentant la réconciliation .
Un film humaniste, dont la portée devrait éveiller les consciences qui ne savent pas éloigner le ressentiment.
A voir sans hésitation jusqu'au 20 août sur Arte.tv