Le temps d'aimer

Le scénario de ce film a pris naissance dans l'histoire de la famille de la réalisatrice Katell Quillévéré. Elle a découvert tard le secret de sa grand-mère, une femme tombée amoureuse à 17 ans d'un soldat allemand pendant l'occupation, dont elle a eu un enfant qu'elle a dû élever seule, avant de rencontrer celui qui est devenu son mari :
"Elle a rencontré mon grand-père quatre ans plus tard, sur une plage en Bretagne. Il était d’un milieu social beaucoup plus aisé que le sien. Il l’a épousée contre l’avis de ses parents et a adopté son enfant. Le secret de la vraie paternité de cet enfant, a été découvert très tard. Ma grand-mère avait plus de quatre-vingts ans et mon grand-père était mort depuis très longtemps. Leur couple et son mystère me questionnera toujours… Il y a donc ce point de départ très personnel, puis l’imagination a totalement pris le relais et le scénario est devenu une fiction…"

Le film démarre à la Libération, par l'épisode de la tonte, censé punir toutes les femmes ayant eu des rapports avec l'ennemi. Pour Madeleine, c'est l'humiliation suprême, mais c'est aussi ce qui va impulser en elle un élan de vie. Elle n'a pas d'autre choix que de travailler pour assurer sa survie et celle de Daniel, son petit garçon. Elle est serveuse dans un hôtel-restaurant d'une ville de la côte atlantique. Lorsqu'elle assure son service, l'enfant reste jouer seul dans la chambre de bonne où ils logent tous deux, et pendant ses temps de repos, elle l'emmène jouer sur la plage. Un jour, ils rencontrent François, dont la tenue vestimentaire et le vocabulaire témoignent d'un rang social plus élevé. Entre François et Madeleine, il y a tout de suite une attirance réciproque qui se concrétise quelque temps après par un mariage, contre l'avis des parents de François. Il doit finir sa thèse d'archéologie, mais en même temps faire vivre cette famille qu'il a créée...
Avec tact et sensibilité, Katell Quillévéré fait avancer l'intrigue en dévoilant peu à peu les énigmes des personnages. Madeleine et François ont besoin de se reconstruire, l'une en dépassant son passé, l'autre en tentant d'oublier son identité. La réussite de leur couple ne peut se faire que dans l'acceptation de leurs différences respectives. Et le petit Daniel sait lui aussi que sa mère lui cache un secret.
La réalisatrice donne à voir la France de l'après-guerre à Châteauroux avec les dancing, les GI, et les tabous de l'époque qui n'ont pas complètement disparu aujourd'hui . Elle propose une réflexion sur le couple, sur la réparation, sur le poids de la société et sur la force du sentiment amoureux.
Ce drame romanesque, émouvant , est porté par l'interprétation brillante d'Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste, tous deux à la fois fragiles et déterminés, sincères et intenses, complètement habités par leurs rôles.
A voir sans hésitation !