Séjour sur les Monts Fuchun

Ce film du jeune chinois Gu Xiaogang est le premier volet d'une trilogie mettant en scène une famille sur trois générations et au fil des saisons, dans la ville de Fuyang, à 200 km au sud de Shangaï.
Son titre est emprunté à une peinture du 14è siècle de l'artiste Huang Gongwang , peinture traditionnelle sur un rouleau de 5m, que l'on déploie de droite à gauche pour faire apparaître un paysage composé essentiellement de montagne et d'eau, les monts Fuchun, bordant le fleuve Qiantang, où l'artiste a passé les dernières années de sa vie.
Cette référence au passé est omniprésente dans cette chronique familiale qui traite des mutations de la Chine d'aujourd'hui : on démolit des quartiers entiers pour reconstruire des immeubles de luxe, les jeunes subissent l'influence occidentale en voulant conquérir leur liberté.
Dans la première scène, on fête les 70 ans de la grand-mère Mum avec ses quatre fils, ses petits-fils, ses belles-filles , dans une ambiance joyeuse . A la fin du repas, Mum a un malaise, ce qui signifie que sa santé fragile ne lui permet plus de vivre seule. Les fils vont donc se la partager, un souci de plus pour certains qui sont couverts de dettes. On parle beaucoup d'argent dans le film, celui que l'on gagne honnêtement par le travail (restauration, pêche) ou celui de la spéculation ou du jeu, acquis facilement.
Le mariage aussi doit garantir un confort financier, selon les parents; il n'est pas question de sentiments , mais les jeunes générations, plus ouvertes au monde, ne partagent pas cet avis, quitte à entrer en conflit avec leurs parents.
Tandis que tous les membres de la famille se retrouvent ou s'éloignent, Gu Xiaogang filme de longs plans-séquences sur la nature, au fil des saisons, comme des rouleaux successifs de poésie qu'il nous livre de cette région qui est celle de son enfance, et dont il parvient à transmettre la beauté, la sérénité . La ville est aussi tout autant inspirante; le contraste entre ville et nature, rappelle celui des générations : modernité ou tradition sont évoquées sans être jugées.
Avec une mise en scène bien maîtrisée pour ce premier long-métrage de 2 heures et demie, le cinéaste met en avant les transformations de la société chinoise avec un souci de la forme original, que ce soit au niveau visuel ou sonore.
A voir pour son double intérêt : un témoignage de société sur la Chine d'aujourd'hui et un style cinématographique singulier.

Comments

[dasola]

Bonjour Ritournelle, c'est le deuxième film que j'ai vu en 2020. Vraiment bien. Je le recommande autour de moi. J'attends la suite avec impatience. Bonne journée.

[Ritournelle]

Le seul bémol que je pourrais ajouter est que je m'attendais à plus de plans sur la nature, mais l'ensemble est intéressant!