Les cendres du temps-redux

Ce film du cinéaste hongkongais Wong Kar Wai est une version retravaillée de celle de 1994, au niveau des couleurs et de la musique, visant à en améliorer la qualité technique. Le scénario est inspiré de La légende du héros chasseur d'aigles, de Jin Yong, se déroulant dans la Chine du XIIe, ce qui implique d'associer aux thèmes habituels de l'univers du cinéaste, dont le magnifique In the mood for love reste en mémoire, les codes du film de sabre : vengeance, amour, trahison, amitié, code de l'honneur, loyauté.
C'est l'histoire de Ouyang Feng qui s'est retiré dans le désert pour oublier celle qu'il a aimée dans la Montagne du Chameau blanc, car fatiguée de l'attendre, elle a épousé son frère. Il engage des tueurs à gages experts en arts martiaux pour exécuter des contrats. Tous ces gens qui passent viennent assouvir un désir de vengeance pour apaiser la souffrance d'un amour déçu. Et puis il y a aussi la visite annuelle de Yaoshi, cet ami qui vient prendre des nouvelles de Feng pour les transmettre à celle qui l'aime toujours, bien qu'elle ait épousé son frère.
Le défilé de ces guerriers assoiffés de vengeance et de ces femmes qui attendent, les flash-backs  dans le passé, les voix off, qui entremêlent le récit à celui de Feng, rendent le scénario confus. Ce sont autant de versions d'amour malheureux.
Si l'on se perd souvent dans l'histoire, il n'en reste pas moins que l'on est subjugué par la beauté des images, la sensualité des personnages qui sont caractéristiques de l'œuvre du cinéaste. Il y a dans ce film de ces débuts les thèmes que l'on va retrouver par la suite, c'est à dire l'oubli impossible, l'amour malheureux, la solitude. Il est dommage qu'il ait voulu y associer l'univers du film de sabre qui n'ajoute rien aux personnages.
Toutefois, on est conquis par le souci d'esthétisme tout au long du film, que ce soit dans les tableaux de paysages ou dans les scènes de combat, le travail de la couleur et de la lumière est remarquable. De même, le choix et la direction des acteurs apportent de la magie et de la poésie à cette œuvre empreinte de nostalgie.