Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Ritournelle

Il reste encore demain

Ritournelle
Il reste encore demain

Le néo-réalisme a donné au cinéma italien un succès international dans les années 50 et 60. Paola Cortellesi s'est inspirée de cette veine populaire pour son premier long métrage. Actrice, humoriste, présentatrice télé, elle est avec ce film, reconnue en tant que réalisatrice, non seulement à cause de l'impact de son propos dans un pays marqué par le féminicide d'une étudiante en novembre 2023, mais aussi par la qualité esthétique de son film.
"Dans Il reste encore demain, j’ai voulu raconter les actions extraordinaires de toutes ces femmes ordinaires qui ont construit, sans même le savoir, l’Italie. Delia, c’est notre grand-mère, notre arrière-grand-mère. Qui sait si elles avaient envisagé elles aussi un « demain » possible."
Rome,1946. Delia est l'épouse d'Ivano; ils ont trois enfants, une fille, Marcella et deux garçons plus jeunes. Ils vivent dans un petit appartement dont l'une des chambres est occupée par le père d'Ivano, un vieillard exigeant et peu amène. Delia s'occupe de tout le monde, trouve des petits boulots à l'extérieur pour améliorer le quotidien dans un pays qui sort à peine de la guerre. Malgré cela, elle subit régulièrement la violence de son mari , souvent sans la moindre raison, mais parce que c'est une sorte de rituel machiste qui se perpétue d'une génération à l'autre. Delia se confie à son amie Marisa et elle trouve aussi un peu de réconfort en Nino, le garagiste amoureux d'elle depuis l'adolescence, qui veut quitter Rome pour un avenir qu'il imagine meilleur.
Un événement vient interrompre cette routine : les fiançailles de Marcella avec un jeune homme d'une famille plus aisée. Malgré un abord affable et souriant, Delia perçoit en lui un désir de possession qui ne pourra pas faire le bonheur de sa fille. Elle fait tout pour éviter ce mariage. Mais qu'en sera-t-il de son propre sort?
La complicité mère-fille est fort bien représentée par ce désir commun de se soutenir inconsciemment, même si Marcella condamne la faiblesse de sa mère qui accepte tout de son mari.
Bien que leurs caractères soient opposés, l'une étant dans l'enthousiasme de la jeunesse et l'autre dans le désenchantement de sa condition d'épouse, toutes deux doivent lutter pour changer les choses; le message de Paola Cortellesi est bien politique, il n'y a de solution que par l'émancipation. Et son habileté consiste à faire passer ce message par le biais de la comédie, un comédie chorégraphiée dans laquelle la danse fait suite aux moments de violence, pour mieux souligner la bouffonnerie, le caractère grotesque et vulgaire de celui qui fait du mal : "Ce qui m'intéressait, c'était de représenter ces hommes qui sont les méchants de cette histoire comme des idiots, des crétins. Parce que souvent les méchants sont très fascinants. On aime bien le gangster, le méchant. Il est très fascinant pour celui qui les regarde souvent. J'avais envie de personnages qui fassent peur, représentent un danger, une dureté, la violence, mais en même temps qu'ils soient complètement idiots".
Cette alternance typiquement italienne de gravité et de fantaisie, de drame qui se fait légèreté, se retrouve aussi chez Roberto Benigni, elle laisse entrevoir une lueur d'espoir, parce qu'il "reste encore demain".
L'image magnifique en noir et blanc rappelle l'esthétique du néoréalisme, la bande son qui va des années 50 aux rappeurs américains d'Outkast, donne une actualité à ce propos servi par des acteurs très justes.
Il va sans dire que le féminicide de Padoue, qui a succédé à la sortie du film, a impulsé un immense succès à cette histoire audacieuse et bouleversante, à la mise en scène originale, dont on espère qu'elle impactera les mentalités au même titre que les mouvements féministes dans leur lutte contre le patriarcat.

A voir sans hésiter!

Il reste encore demain
Il reste encore demain
Il reste encore demain
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commentaires