Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Ritournelle

Un monde flamboyant - Siri Hustvedt

Ritournelle
Un monde flamboyant - Siri Hustvedt

Siri Hustvedt aborde dans ce roman foisonnant des thèmes qui lui sont chers : la condition féminine, l'art, les relations humaines,l'introspection, par le biais du personnage de Harriet Burden. Mariée à un galeriste marchand d'art de renom, elle vit dans l'ombre de celui-ci et ce n'est qu'après son décès que commence pour Harriet une nouvelle vie, centrée sur l'art. Consciente qu'au fil du temps, ce sont les hommes qui ont été reconnus dans ce domaine, elle produit une œuvre en utilisant des masques, ceux de trois hommes bien différents avec qui elle aura des relations parfois douloureuses.
Après sa disparition, un universitaire tente d'analyser l'oeuvre d'Harriet en utilisant les témoignages de ceux qui l'ont approchée ; il fait le lien entre ces différents personnages, famille, amants, ami(e)s, psychiatre. Le roman,composé de ces fragments, auxquels il faut ajouter les carnets d'Harriet, prend plusieurs orientations dont la plus importante reste celle de l'art : on assiste au mystère de la création, les installations d'Harriet sont la concrétisation d'émotions enfouies, de violentes pulsions ; chacun des masques crée un monde particulier, ce qui prouve que l'identité de l'artiste est multiple et que le lecteur peut aussi envisager plusieurs interprétations de l'oeuvre ; le regard des autres offre en retour à l'artiste plusieurs aspects d'elle-même et donc aide à la connaissance de soi.
Dans cette quête d'identité, Harriet casse les codes dans la mesure où déjà son apparence physique plutôt masculine l'éloigne d'une certaine féminité. Ensuite, le choix de faire porter son oeuvre par des hommes signifie qu'elle peut aussi avoir une ambition intellectuelle et non uniquement émotionnelle. Ces hommes eux-mêmes sont complexes, différents : noir, gay, ou naïf, mégalomane,compliqué...
Dans le personnage d'Harriet, il y a beaucoup de Louise Bourgeois, de Nicky de St Phalle, de ces femmes artistes qui ont transgressé les frontières, oeuvré pour s'affirmer, obtenir une reconnaissance par leur travail et mis leurs émotions au service de leurs pensées.

Harriet est Siri, elle est aussi le lecteur qui avance dans le roman en se posant plusieurs questions. Nous sommes multiples et nous avons aussi des perceptions différentes de l'oeuvre d'art.
Ce n'est pas une lecture toujours facile, elle peut parfois être déroutante, c'est l'oeuvre d'une personnalité riche, aux centres d'intérêt très variés, complexe, exigeante, à la fois fragile et forte, soucieuse de laisser les mots sonder son moi profond.

"Il y a beaucoup d’inconscient dans le préjugé. Ce qui affleure à la surface, c’est une aversion non identifiée, que l’on justifie alors de quelque façon rationnelle."

"S’il y a une chose qui ne marche pas dans le monde de l’art, c’est l’excès de sincérité."

"Il ne séduisait personne. Il séduisait tout le monde, et c'est très différent. Je suis un spécialiste de la présentation personnelle, et il est formidablement important de paraître détaché, sinon indifférent aux opinons d'autrui."

"J'ai fermé les yeux. Je les ai rouverts, et je suis restée sur place en souriant parce que les couleurs étaient encore là – du rouge, de l'orange, du jaune, et des verts et des bleus et du violet – brûlantes, flamboyantes dans cette grande pièce où Harry travaillait, et j'ai su avec certitude que chacune de ces choses barbares, cinglées et tristes que Harry avait créées étaient vivantes de la vie de l'esprit."

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commentaires
M
Je ne manquerai pas ce livre qui me paraît fort intéressant. ..merci
Répondre